- 12 avril 2021
RAPPORT D’ANALYSE PAR LA COMMISSION PERMANENTE CHARGEE DES QUESTIONS POLITIQUES, DIPLOMATIQUES, DE DEFENSE ET DE SECURITE DU PROJET DE LOI PORTANT RATIFICATION DU PROTOCOLE DE MISE EN PLACE DE L’ASSISTANCE FINANCIERE ENTRE LE GOUVERNEMENT DE LA REPUBLIQUE DU BURUNDI ET LE GOUVERNEMENT DE LA REPUBLIQUE DE TURQUIE
I. INTRODUCTION
En date du 12 avril 2021, les sénateurs membres de la Commission permanente chargée des questions politiques, diplomatiques, de défense et de sécurité se sont réunis pour analyser le projet de loi dont l’objet est repris ci-haut.
La séance a été marquée par la présence du Ministre de la Défense Nationale et des Anciens Combattants qui avait représenté le Gouvernement pour éclairer les sénateurs membres de la Commission saisie au fond pour analyser ce projet de loi, sur les questions qui suscitaient des interrogations ainsi que l’intérêt et l’urgence de le ratifier.
Lors de l’analyse du projet de loi, les documents ci-dessous ont été utilisés :
- La Constitution de la République du Burundi ;
- Le projet de loi de ratification sous sa version gouvernementale et son exposé des motifs ;
- L’instrument de ratification par la République du Burundi du projet de loi portant ratification du Protocole de mise en place de l’assistance financière entre le Gouvernement de la République du Burundi et le Gouvernement de la République de Turquie ;
- Le Protocole de mise en place de l’assistance financière entre le Gouvernement de la République du Burundi et le Gouvernement de la République de Turquie ;
- Le projet de loi de ratification par la République du Burundi du Protocole de mise en place de l’assistance financière entre le Gouvernement de la République du Burundi et le Gouvernement de la République de Turquie tel qu’adopté par l’Assemblée Nationale.
Le présent rapport comprend les points ci-après :
- L’introduction ;
- L’intérêt du projet de loi de ratification;
- Lecontenu du projet de loi de ratification;
- Les questions posées au représentant du Gouvernement et les réponses données ;
- La conclusion.
- INTERET DU PROJET DE LOI DE RATIFICATION
Dans le cadre de renforcer les relations amicales et de développer les forces armées de la République du Burundi, le Gouvernement de la République de Turquie vient d’établir les principes de mise en place d’une aide financière de cinq millions de Livres Turques (5.000.000TL) pour notre pays.
Ce montant va couvrir les frais de transport, de restauration et d’hébergement ainsi que les frais de formation du personnel de la Force de Défense Nationale du Burundi qui bénéficiera des formations dans des centres de formation militaire turcs. Il va également couvrir les frais de transport pour les visites des Officiels burundais du Ministère de la Défense Nationale et des Anciens Combattants au Ministère de la Défense Nationale Turque.
- CONTENU DU PROJET DE LOI DE RATIFICATION
Outre son préambule, le présent Protocole de mise en place de l’assistance financière entre le Gouvernement de la République du Burundi et le Gouvernement de la République de Turquie s’articule sur 10 articles dont le contenu est énoncé formellement dans l’exposé des motifs.
- QUESTIONS POSEES AU REPRESENTANT DU GOUVERNEMENT ET LES REPONSES DONNEES
Question 1
L’article 1 de ce projet de loi indique qu’un montant de 5.000.000 de Livres Turques équivalant environ à 700.000 USD est alloué au Gouvernement de la République du Burundi par le Gouvernement de la République de Turquie comme aide financière et l’article 2 quant à lui précise les modalités de son utilisation à savoir :
- les frais de formation du personnel de la Force de Défense nationale du Burundi (excepté des formations jugées coûteuses par les Forces Armées Turques) ;
- les frais de transport du personnel de la Force de Défense Nationale du Burundi à former ;
- les frais de restauration et d’hébergement ;
- les frais de transport pour les visites des Officiels burundais au Ministère de la Défense Nationale Turque, au Chef d’Etat-Major Général, au Commandant des Forces Terrestres, au Commandant des Forces Navales, au Commandant des Forces Aériennes et à leurs affiliés, ou
- les frais de transport pour les visites d’individus dans le cadre des activités organisées par les institutions ci-haut mentionnées et à leurs affiliés.
Monsieur le Ministre,
- ne trouvez-vous pas que ce montant est apparemment dérisoire pour pouvoir couvrir tous ces frais auxquels il est alloué ?
Réponse
Le montant d’assistance financière avoisine un milliard quatre cent millions (1.400.000.000) de francs burundais si on procède à la conversion avec le taux de change
du jour. Le Budget annuel de la formation à l’étranger sur le litera « Bourses et Stages » est estimé à deux milliards cent millions (2.100.000.000) de francs burundais. Cette assistance financière de la Turquie représente 13% des frais de bourse et stages annuels de la FDNB sur le litera « Bourses et Stages ». Vous conviendrez bien avec moi que nous ne pouvons pas refuser ce montant d’autant plus qu’il constitue une plus-value sur notre budget annuel de formation. Bien plus, il est conseillé de ne pas refuser un aide si minime qu’elle soit.
- pourquoi avez-vous préféré que ces formations se fassent uniquement en Turquie et qui va supporter les frais de voyage?
Réponse
- Que les formations se fassent en Turquie, nous considérons que cela ne peut causer aucun problème parce qu’elles seront faites à l’instar des autres formations faites dans d’autres pays partenaires. Et d’ailleurs, il est le nouveau venu avec notre pays dans la coopération militaire. L’essentiel pour nous est que nos militaires acquièrent des connaissances qui seront bénéfiques pour la FDNB.Comme les frais de voyage ne sont pas mentionnés dans ce Protocole, ils seront supportés par le Gouvernement de la République du Burundi sur le litera « Bourses et Stages » et seront pris en compte dans le Plan d’Action Annuel (PAA).
- qu’est-ce que la Turquie va gagner en retour puisque de telles relations reflètent généralement des principes de coût-profit ?
Réponse
En matière de coopération entre les Etats, il existe plusieurs façons d’aborder la coopération. Les puissances militaires offrent des formations à des militaires d’autres pays. Pour le cas d’espèce, c’est la coopération bilatérale dans le domaine militaire. Ainsi, la Turquie étant une puissance militaire qui côtoie régulièrement les militaires burundais dans des opérations de maintien de la Paix en Somalie et y observe leurs actions. Elle voie notre pays comme un pays contributeur de troupes au niveau de l’Union Africaine et des Nations Unies. Par conséquent, un pays contributeur de troupes devient intéressant pour les puissances militaires puisqu’il aura à s’approvisionner militairement (équipement et matériel).
- une telle coopération ne pourrait-elle pas entrainer des violations de secrets militaires ?
Réponse
Une telle coopération ne pourrait pas entrainer des violations de secret militaire dans la mesure où les stagiaires qui seront désignés seront des cadres militaires et suivront la formation en Turquie. En outre, l’article 5 dudit Protocole relatif à la sécurité des informations classifiées est clair là-dessus. Par ailleurs, le MDNAC envoie les stagiaires dans d’autres pays partenaires et la Turquie ne pourrait faire exception.
Question 2
L’article 2 du Protocole relatif à la délimitation stipule que l’assistance financière fournie par la République de Turquie comprend les frais de transport, de restauration et d’hébergement ainsi que les frais de formation (excepté des formations jugées coûteuses par les Forces Armées Turques) du personnel de la Force de Défense Nationale du Burundi qui bénéficiera des formations dispensées/coordonnées par les Centres de Formation disponibles dans la structure des Forces Armées Turques.
Monsieur le Ministre,
- pourquoi cette exception alors que c’est le Burundi qui connaît certainement les domaines prioritaires qui nécessitent ce renforcement des capacités ?
Réponse
D’une part, c’est la FDNB qui choisit les formations prioritaires. D’autre part, ce sont les pays partenaires qui proposent l’éventail des programmes de formations disponibles dans leurs pays mais il revient à la partie burundaise de se positionner sur les formations jugées nécessaires.
- ne trouvez-vous pas qu’il y a eu violation du principe de non-ingérence?
Réponse
Non, la Turquie n’a rien dit des domaines prioritaires de la formation de la FDNB mais plutôt du coût de formation et du montant de l’enveloppe alloué annuellement. La partie turque fera uniquement des propositions et la FDNB désignera ses candidats selon les domaines jugés utiles.
- pour plus d’efficacité, ne faudrait-il pas que le choix des domaines d’intervention incombe au Burundi sans tenir compte du coût ?
Réponse
Effectivement, le choix des domaines prioritaires incombe au Gouvernement burundais. Cependant, il est impossible de ne pas tenir compte du coût parce que la formation exige un coût et celui-ci doit correspondre à l’enveloppe alloué à la partie burundaise.
- pourquoi ce protocole n’a pas prévu l’autonomie de gestion aux autorités de la FDN burundaise?
Réponse
L’essentiel pour nous n’est pas le gestionnaire de ces fonds mais plutôt l’efficacité, c’est-à-dire, les activités dont la FDNB aura à bénéficier.
- comme la Turquie a déjà ouvert son Ambassade au Burundi, est-il nécessaire que la supervision continue de se faire au Kenya ?
Réponse
Lors de la signature du présent Protocole, la Turquie n’avait pas d’Ambassade au Burundi. La mise en place de l’Ambassade de Turquie au Burundi oblige bien sûr à la Turquie le transfert des responsabilités de l’Ambassade de Turquie au Kenya et en Ouganda vers le Burundi. Par conséquent, le suivi de la mise en application du présent Protocole sera facile.
- êtes-vous sûr que la Turquie va gérer cette somme comme un beau père de famille ?
Réponse
Nous espérons bien que la Turquie a aussi des intérêts à tirer de la bonne marche de notre coopération. Par ailleurs, l’article IV alinéa 2 précise que le Bureau/ Ambassade de la République de Turquie informera chaque année le Gouvernement de la République du Burundi du montant alloué. Le reste ne sera que le suivi.
Question 3
L’article 4 relatif aux principes de mise en application de ce projet de loi au point 4, indique que la part notifiée peut être utilisée pendant cinq ans. Le droit d’utilisation sera expiré si elle n’est pas utilisée durant cette période.
Monsieur le Ministre,
- compte tenu des allocations proposées, il est bien clair que les frais de voyage / billets d’avion sont exclus de cette aide alors qu’ils coûtent très chers. Pourriez-vous nous préciser en termes chiffrés le personnel que vous allez envoyer chaque année pour pouvoir consommer ce montant ?
Réponse
Il est encore tôt de chiffrer de façon précise les stagiaires qui seront envoyés en Turquie chaque année. Le MDNAC dispose des besoins prioritaires en matière de formation à l’étranger. Chaque année, la FDNB établit un Plan d’Action Annuel en fonction des besoins prioritaires pour la professionnalisation de ses membres. Il est clair que la partie burundaise soumettra à la Partie turque ses priorités en matière de formation au moment opportun.
La Turquie s’ajoute aux autres pays partenaires qui offrent chaque année des bourses d’étude à la FDNB.
- est-ce que vous ne trouvez pas qu’il y a risque de ne pas consommer tout ce montant suite aux contraintes budgétaires de notre pays pour payer des frais de voyage ?
Réponse
La FDNB établit annuellement un Plan d’Action Annuel et un Plan budgétaire sur le litera « Bourses et Stages » en fonction des moyens financiers alloués au MDNAC. Les frais de voyage qui font défaut dans ce Protocole seront tenus en considération annuellement lors de l’élaboration du PAA.
- CONCLUSION
Une fois ratifié, ce Protocole de mise en place de l’assistance financière entre le Gouvernement de la République du Burundi et le Gouvernement de la République de Turquie renforcera davantage les relations bilatérales entre nos deux pays. Il permettra de formuler et d’étendre la coopération dans les domaines politique, économique, social, militaire, technique, scientifique, culturel, éducationnel, sanitaire, commercial, de l’investissement et d’autres domaines sur base du principe de l’égalité souveraine des Etats.
Pour toutes ces raisons, la Commission permanente chargée des questions politiques, diplomatiques, de défense et de sécurité qui fait d’abord siens les amendements de forme formulés par l’Assemblée Nationale, demande à l’assemblée plénière du Sénat d’adopter à l’unanimité le présent projet de loi de ratification tel que présenté.